Deux princes partirent un jour � l'aventure vers de lointaines contr�es. Mais comme ils s'amusaient beaucoup � faire les quatre cents coups, ils d�cid�rent de ne plus revenir au ch�teau. Leur petit fr�re, qui se faisait du souci, d�cida de partir � leur recherche. Lorsqu'il les trouva enfin, ils se moqu�rent de lui: "Oh! Une chance que tu sois venu, petit fr�re. Car nous n'aurions jamais pu nous d�brouiller seuls; tu es tellement plus intelligent que nous." Mais ils accept�rent quand m�me de l'emmener avec eux.
Ils reprirent donc la route tous ensembles et un jour, au detour d'un sentier, ils aper�urent une fourmili�re. Le plus vieux voulu la fouiller et voir comment les petites fourmis apeur�es se pr�cipiteraient au-dehors, transportant leurs oeufs pour les mettre en s�ret�. Mais le plus jeune dit: "Laisse donc ces animaux en paix, je ne peux pas supporter qu'on les d�range!"
Ils continu�rent et arriv�rent au bord d'un lac sur lequel barbotaient un tr�s grand nombre de canards. Les deux plus vieux voulurent en attraper quelques-uns et les faire cuire, mais le plus jeune ne les laissa pas faire et leur dit: "Laissez donc les animaux en paix, je ne peux pas supporter qu'on les tue!"
Plus
tard, ils trouv�rent une ruche d'abeilles qui �tait tellement
remplie de miel, qu'elle en d�bordait. Les deux fr�res voulurent
faire un feu sous la ruche, afin d'enfumer les abeilles et leur voler leur
miel. Mais le plus jeune les en emp�cha encore et leur dit: "Laissez
donc les animaux en paix, je ne peux pas supporter qu'on les br�le!"
Finalement, les trois fr�res arriv�rent � un ch�teau ensorcel�. Une m�chante sorci�re avait transform� en pierre toutes les plantes, tous les animaux et tous les gens de ce ch�teau, � l'exception du roi. Elle avait �pargn� le roi car elle voulait qu'il souffre de voir ses trois filles dormir d'un sommeil de pierre. Les trois princes se dirig�rent vers la porte du ch�teau et regard�rent � l'int�rieur par un petit trou. L�, ils virent un homme gris et triste comme la pierre assis � une table: c'�tait le roi. Ils l'appel�rent une fois, puis une seconde fois, mais le roi ne les entendit pas. Ils l'appel�rent de nouveau. L�, il se leva, ouvrit la porte et, sans prononcer un seul mot, les conduisit � une table couverte de victuailles. Lorsque les trois princes eurent mang� et bu, qu'ils furent rassasi�s et repus, le roi leur montra leur chambre et ils all�rent dormir.
Le
lendemain matin, le roi vint aupr�s du plus vieux des princes, lui
fit signe de le suivre et le conduisit � une tablette de pierre.
Sur cette tablette se trouvaient trois inscriptions, chacune d�crivant
une �preuve qui devait �tre accomplie pour que le ch�teau
soit d�livr� de son mauvais sort. La premi�re disait:
"Dans la for�t, sous la mousse, gisent les mille perles des
princesses. Elles doivent toutes �tre retrouv�es avant le
coucher du soleil. S'il en manque ne serait-ce qu'une seule, celui qui
les aura cherch� sera chang� en pierre." Le prince partit
donc dans la for�t et chercha durant toute la journ�e. Mais
lorsque la nuit tomba, il en avait seulement trouv� une centaine.
Il arriva ce qui �tait �crit sur la tablette: il fut chang�
en pierre.
Le
jour suivant, le second prince entreprit � son tour de retrouver
les perles. Mais il ne fit pas beaucoup mieux que son fr�re a�n�:
il ne trouva que deux cents perles et fut lui aussi chang� en pierre.
Puis, ce fut au tour du plus jeune de chercher les perles. Mais c'�tait
tellement difficile et cela prenait tellement de temps, qu'il se d�couragea.
Il s'assoya sur une roche et se mit � pleurer. � ce moment,
la reine des fourmis, � qui il avait un jour port� secours,
surgit avec cinq mille autres fourmis. Les petites b�tes cherch�rent
les perles et cela ne leur pris gu�re de temps pour qu'elles les
retrouvent toutes et qu'elles les rassemblent en un petit tas.
Fort
de son succ�s, le jeune prince s'attaqua � la seconde �preuve:
"La clef de la chambre des princesses g�t au fond du lac. Elle
doit �tre retrouv�e avant le coucher du soleil. Si ce n'est
pas le cas, celui qui l'aura cherch� sera chang� en pierre."
Lorsqu'il arriva au bord du lac, les canards, qu'il avait un jour sauv�s,
barbotaient encore. Ceux-ci plong�rent dans les profondeurs du lac
et rapport�rent la clef au prince.
La
derni�re �preuve �tait la plus difficile de toutes:
"Parmi les trois filles du roi, il en est une qui est plus jeune et
plus gentille que les autres. Elle doit �tre reconnue avant le coucher
du soleil. Celui qui se trompera, celui-l� sera chang� en
pierre." Mais les trois princesses se ressemblaient toutes comme des
gouttes d'eau. La seule chose qui permettait de les distinguer �tait
qu'avant d'�tre chang�es en pierre elles avaient mang�
chacune une sucrerie diff�rente: l'a�n�e avait mang�
un morceau de sucre; la deuxi�me, un peu de sirop; la plus jeune,
une cuiller�e de miel. C'est alors qu'arriva la reine des abeilles
dont la ruche avait un jour �t� sauv�e par le jeune
prince. Elle se posa sur les l�vres de chacune des princesses pour
y go�ter les cristaux de sucre qui s'y trouvaient coll�s.
Finalement, elle s'arr�ta sur les l�vres de la troisi�me,
car elles avaient le go�t du miel. C'est ainsi que le jeune prince
pu reconna�tre la plus jeune des princesses.
�
ce moment, le sort fut lev�: toutes les plantes, tous les animaux
et tous ceux qui avaient �t� chang� en pierre reprirent
vie, et les trois princesses se r�veill�rent. Le jeune prince
�pousa la plus jeune et devint le roi apr�s la mort de son
p�re, tandis que ses fr�res mari�rent chacun une des
deux autres princesses.
D'apr�s les fr�res
Grimm
Adaptation fran�aise et illustrations par Jean-Pierre Tanguay
� 1997, Jean-Pierre Tanguay, tous droits r�serv�s.